
Les langues imaginaires sont des langues créées à partir de rien dans le seul but d’être intégrées dans un livre ou un film. Le fait que des auteurs aillent jusqu’à créer des langues entières en dit beaucoup sur leur dédication à rendre leur oeuvre vraisemblable.
Dans la première décade du 20ème siècle, Marcel Proust inventa non pas une langue mais une sonate, la sonate de Vinteuil. C’est dans son célèbre livre A la recherche du temps perdu qu’il écrivit à propos de cette sonate. L’expression exacte, profonde des sentiments d’un de ses personnages dépendait de l’invention de ce chef d’oeuvre musical. Proust n’eut cependant pas besoin d’aller jusqu’à réellement créer la sonate. Sa musique fictive n’avait pas – n’a toujours pas bien sûr – besoin d’être entendue, ni même sa partition besoin d’être lue par ses lecteurs pour qu’ils imaginent les sons harmoniques.
Dans le cas des langues imaginaires, la situation est différente. Que l’oeuvre de fiction soit écrite ou filmée, une simple description de mots bizarres et de sonorité étrangère ne peut faire l’affaire. Pour rendre crédible un monde fictif dans lequel des langues jusqu’alors inconnues sont parlées, laisser les personnages effectivement prononcer les paroles exotiques est essentiel. Sachant cela, les auteurs n’ont donc plus qu’à créer de nouvelles langues accompagnées, pourquoi pas, de leurs propres alphabets …
Langues imaginaires : du schtroumpf au klingon
Sûrement, la plus simple de toutes les langues imaginaires qui ait jamais été inventée est le schtroumpf. Mais, il y en a de bien plus élaborées. Le klingon par exemple, une langue qui a été créée pour être utilisée par des personnages dans les films Star Trek, peut maintenant être trouvée dans le traducteur en ligne de Bing parmi d’autres langues bien réelles, elles.
Marc Okran, un linguiste états-unien, fut chargé de concevoir cette langue. Il a commencé par imaginer quelle serait sa prononciation, ses sonorités. Il connaissait déjà les noms de personnages klingon utilisés dans la série. Il a donc utilisé les sons de ces mots et en a ajouté d’autres.
Ensuite, Okran a inventé les règles de grammaire. Son idée directrice était que le klingon étant une langue non-humaine, elle devait être aussi différente que possible des langues humaines. Il choisit donc par exemple l’ordre des mots Objet-Verbe-Sujet qui est l’ordre des mots le moins utilisé par les langues humaines. Sa troisième tâche fut d’inventer le vocabulaire du scénario. Vous pouvez regarder Marc Okran expliquer tout ce processus (en anglais) en plus de détails dans cette vidéo.
Le philologiste** John Ronald Reuel Tolkien (1892-1973; et oui, parfois on a définitivement besoin d’être le titulaire d’un long nom pour réussir de grandes choses) était un spécialiste en langues germaniques et écrivit entre autres textes de science fiction, Le Hobbit et Lord of the Rings, bien connus aujourd’hui pour leurs adaptations cinématographiques. Il créa non pas une langue mais plusieurs, qu’il fit descendre de la même famille de langue (elle aussi inventée), l’elfique ancien. Ses deux langues elfiques les plus abouties sont le quenya et le sindarin.
Pas mal d’autres langues imaginaires existent et sont chaque jour encore améliorées par leur inventeur ou leurs fans. Si vous êtes le genre de personne qui n’aime pas suivre la foule et qui de toute façon ne cherche que les rencontres extra-ordinaires et rien d’autre, alors vous devez définitivement apprendre une de ces langues inventées. Vous pourrez ensuite la tester sur tous les inconnus que vous croiserez et un beau jour, vous finirez forcément par rencontrer votre âme soeur linguistique.
* Un grand ‘merci’ à @plqaD sur Twitter qui a corrigé mon klingon !
** philologiste : spécialiste des langues à travers l’histoire, sorte de détective occupé à étudier les langues anciennes (y compris ces langues qui ont toujours besoin d’être déchiffrées)
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