Aujourd’hui, je me suis faite engueuler par un Roumain.
J’étais dans cette situation bien connue où le cligno tout feu tout flamme de ma voiture indiquait sans l’ombre d’un doute mon intention de prendre une place de parking aussitôt que trente-six voitures seraient passées entre la dite place et ma voiture. Mais bien sûr, oui, une trente-septième voiture est arrivée …
Je suis donc sortie de ma voiture et suis allée taper au carreau de la voiture en question … « Aaah, tu m’as fait peur ! J’suis au téléphone, tu vois pas!? », m’a dit le Roumain de la trente-septième, l’air furieux. Il ne m’avait effectivement pas vue venir, tout occupé qu’il était à tenir son téléphone (un téléphone sans fil, oui, oui) d’une main et à tourner le volant de l’autre. Interloquée par sa réaction, j’ai pris la chose comme on la prend quand on se fait en plus saucer par une pluie torrentielle, je lui ai répondu sur un ton badin et sympathique : « – Ooh, téléphone au volant … »
Mais pendant que je disais ça (c’est là où mon histoire diverge de l’histoire habituelle), j’ai eu l’agréable surprise de voir le visage de mon interlocuteur changer du tout au tout. Il avait de son côté fait semblant d’être fâché. L’incongruité de sa réaction était voulue et je n’ai même pas eu beaucoup à baragouiner pour qu’il accepte de me rendre la place de parking qu’il venait de me piquer !
Tout ça pour vous annoncer que la sous-rubrique dans laquelle cet article a trouvé sa place de parking à lui s’appelle désormais ‘Des langues et des frontières’. Avant, c’était ‘Une Française en Espagne’, mais j’ai déménagé pour la Roumanie, j’ai dit Adiós amigos ! à la Péninsule espagnole et tous les matins maintenant je dis Bună ziua ! à la Roumanie (qui fête ses 100 ans cette année à propos).
Une cigogne passant par la Roumanie
Raisons pour mon changement de bout de Terre
L’Espagne où j’ai vécu pendant cinq ans, j’y ai trouvé ce que j’étais allée y chercher : des gens souriants et une météo ensoleillée mais pas trop (j’étais dans le nord).
Les gens souriants, ça m’a fait beaucoup de bien. Ca m’a rendue plus assertive en fait. A force de m’entendre dire « Tranquila, tranquila, no pasa nada … » (‘Ne t’inquiète pas, ne t’inquiète pas, il ne se passe rien’), j’ai tout simplement, mécaniquement, commencé à avoir moins peur de me faire engueuler à tout bout de champ. (Oui, effectivement, je vivais en France auparavant …)
Dans un second temps par contre, j’ai expérimenté la difficulté qu’il y a à ressentir une émotion négative au milieu de gens qui ne semblent pas savoir ce que c’est. Ils ne font pas beaucoup de pauses « mauvaise-humeur » les Espagnols apparemment. C’est sourire tout le temps et il ne faut pas venir gâcher l’ambiance. Dur, dur pour une Française aussi sympathique soit-elle …
J’ai par ailleurs rencontré une autre difficulté assez insurmontable dans la vie de tous les jours : le manque de professionnels qui fassent leur boulot. En France, quand j’appelais un plombier, je me demandais s’il allait être sympa. Je n’avais jamais envisagé qu’il pourrait ne pas résoudre le problème. En Espagne, j’ai abandonné l’affaire au bout de deux plombiers et de quatre électriciens. Pour les comptables, j’ai fini par en trouver une au bout de mon cinquième essai. Je ne parle pas des services clients pour l’internet. Et évidemment, personne ne s’excuse jamais.
Alors voilà, au bout de cinq ans en Espagne, les sourires, je trouve ça toujours sympa mais je ne les recherche plus autant qu’avant. Je m’en méfie même et ce sont les gens bourrus qui me font maintenant lever les sourcils avec intérêt.
Côté langage, mon accent en espagnol a toujours été terrible. Rester vingt ans en Espagne n’y changerait rien. Ce qui n’est pas un problème bien sûr. Au contraire, un accent est avant tout la preuve des efforts qu’une personne a faits pour apprendre une langue. C’est beau. Mais dans mon cas particulier, cela veut aussi dire qu’en Espagne, je serais toujours au mieux traitée de la franceza et dans les supermarchés, les caissières me parleraient toujours régulièrement en anglais, persuadées que je ne peux être autre chose qu’une touriste.
Mes débuts en Roumanie
Des vaches sur une route en Roumanie
En ce qui concerne la langue roumaine, je la parlais heureusement déjà assez bien avant d’arriver. Ca m’a aidée énormément, surtout que tout ce qui est administratif est à faire justement à l’arrivée, quand on n’est pas encore complètement à l’aise avec la langue. J’en suis, pour tout vous dire, à attendre la transcription de la traduction de mon acte de naissance et je pense bientôt m’occuper du changement de la plaque d’immatriculation de ma voiture … Un peu galère tout ça, mais c’est sûr que ça aide à connaître le pays et ça oblige à parler !
Au niveau météo roumaine, je n’ai pour l’instant testé (mais comme beaucoup d’entre vous dans d’autres pays cet été) que la canicule entrecoupée d’orages. Ce n’est pas exceptionnellement marrant de chercher une déchetterie où se débarrasser d’un frigo tout rouillé sous 35 degrés (surtout que ça ne semble pas exister les déchetteries ici) et j’appréhende un petit peu les -20 degrés et les grosses chutes de neige de l’hiver roumain, mais j’ai enfin retrouvé le précieux trésor que j’avais perdu en quittant la Normandie il y a cinq ans : je me sens de nouveau chez moi là où je viens de poser mes valises …
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